Compte rendu triathlon de Gerardmer 2008-07-08
Ce samedi, 07 septembre avait lieu le 20ème triathlon de Gerardmer. Après avoir accueilli plusieurs épreuves IRONMAN, ainsi que d’autres épreuves d’envergures, la ville vosgienne fêtait son 20ième anniversaire en organisant le championnat d’Europe longue distance. Malgré un calendrier chargé (championnats du monde la semaine précédente, IRONMAN d’Angleterre et l’half IRONMAN de Monaco le même w-e) de nombreux grands noms de la discipline s’étaient donnés rendez-vous. Des athlètes venus de toute l’Europe, comme les Anglais Gambles et Amay, des tchèques (Vabrousek, Verner) italiens (Pertusati, podium à Brasschaat l’an passé), danois (Johnsen), autrichien, slovaque, mais surtout une impressionnante délégation française constituée entre autre de Gilles Reboul, 3ième l’an dernier, Xavier LeFloch, vainqueur du mythique EMBRUNMAN le mois passé et Julien Loy, tout récent champion du monde, sont prêts à en découdre sur un parcours long et difficile. En effet, le format proposé est un triathlon ¾, avec pour commencer une natation de 4000m dans les superbes eaux du lac vosgien, 120 km de vélo constitués de 3 boucles très vallonnées (plus de 30 km de côtes au total) et, enfin, 30 km à pied (4 tours de 7,5km avec +/- 100 m de dénivelé chacuns). En plus de ce parcours musclé, une température très fraiche (moins de 20°C) et une pluie battante vont accompagner les participants tout au long de la journée. Mais, il en faut plus pour décourager les triathlètes, supporters, bénévoles et arbitres. Et, sur le coup de 8h40 une meute de plus ou moins 750 sportifs plonge dans le lac.
Après la traditionnelle bagarre du départ, je cherche la première bouée, mais il y a du monde devant et je ne vois que des bonnets. Je prends encore quelques coups et décide alors de nager seul. Après 1400m, la première bouée est enfin en vue, le rythme n’est pas génial. Il me semble que je manque de sens de course : je ne m’oriente pas bien, je ne vois pas les groupes qui se forment, je ne sens pas le moment où je dois accélérer pour mes replacer dans les pieds des autres… Le peu de compétition cette année (c’est seulement mon 3ième triathlon cette saison) y est pour quelque chose. La journée sera longue, donc je ne m’affole pas et continue sur ma lancée en nageant la plupart du temps tout seul. Les minutes défilent, les kilomètres aussi, je n’ai toujours pas mal aux bras et il me semble que je ne faiblis pas. Curieusement, dans les derniers mètres, quelques concurrents se regroupent et je me retrouve dans un paquet pour sortir de l’eau. Aussitôt sur la terre ferme, je consulte ma montre : 1H02, je m’attendais à ce temps, qui me satisfait. Les entrainements de ces 3 dernières semaines avec mon pôte Mickael ont payé. J’attrape mon sac de transition, puis une fois dans la tente, j’enlève ma combi calmement, prends le temps de passer une veste, d’avaler un gel et une gorgée d’eau. Je monte sur mon vélo et profite du premier kilomètre pour faire tourner les jambes rapidement afin de retrouver mon coup de pédale et ma position. Voila déjà la première côte, près de 2 kilomètres à plus de 6% de moyenne pour rejoindre la station de ski de Gerardmer. Les sensations sont bonnes, je dépasse déjà quelques concurrents, mais j’essaye de ne pas m’emballer, ne pas faire monter les pulsations trop haut. Je pédale donc en souplesse, tout à gauche. Je bascule dans la première descente, il faut rester vigilent, la route est sinueuse et détrempée, de plus, des gens moins agiles sur leurs vélos gênent les plus rapides. Après cela, une série de faux plats nous emmènent aux pieds du col des Feignes, la route est granuleuse et ne rend pas bien, de plus, il y a du vent, la vitesse n’est donc pas très rapide. Heureusement le paysage vaut le coup d’œil, on peut admirer les superbes lacs de Longemer et Retournemer. Me voici dans la première pente, assez rude (surement 7-8%), après cela un léger replat, un virage, puis de nouveau 500m plus difficile. Je reviens sur un pro, un Danois, la pente se fait moins dure, on passe le sommet du col, à près de 1000m d’altitude. Je mange, bois un coup. La descente est rapide : 11 km en faux plats sans virage. Dans cette partie, mon vélo de chrono m’avantage. Il est temps d’arriver en bas, je grelotte, j’ai les mains gelées, les quelques virages techniques se négocient difficilement. Heureusement, l’ascension du prochain col, le col des Grosses pierres, 6km à presque 5.5% de moyenne va me réchauffer. Au pied de celui-ci, j’aperçois encore un pro, grâce à mon inertie, je m’approche à quelques mètres de lui, je le reconnais, c’est Xavier Diepart. Il se retourne, il a l’air bien. Il mène avec un bon rythme, je ne le dépasse pas. Il me distance même de quelques mètres, je regarde mon cardio, je reste dans ma zone, sans m’affoler. La descente suivante est plus sinueuse que la suivante, il faut faire attention dans les quelques virages à ne pas glisser sur les lignes blanches, rendues glissantes par la pluie. Je passe Xavier, mais un saut de chaîne m’oblige à m’arrêter. Je replace ma chaîne correctement et repart. Voila du temps perdu bêtement. Une légère remontée vient casser le rythme des concurrents. Je suis énervé, je la passe sur la plaque. Au sommet, un spectateur renseigne les participants sur leur classement, je suis 31ième. Xavier est de nouveau en point de mire, nous retournons sur Gerardmer, pour un premier passage sur la ligne. A l’approche de celle-ci des spectateurs nous reconnaissent et nous encourage. Petit coup d’œil au chronomètre 1H10, 34 km/heure de moyenne, je suis dans les temps, c’est tout bon.
Le parcours est plus chargé qu’au premier tour, les équipes parties plus tard, ainsi que les nageurs les plus lents de la vague open sont « avalés » rapidement. Mon frère et sa copine sont dans la première bosse du parcours et m’encourage. Ca fait chaud au cÅ“ur. Je continue sur ma lancée, sans me retourner, en surveillant mon alimentation, il fait froid, il faut donc manger plus. Je rattrape Benoit sur la fin du col des bas rupt et me lance dans la descente rapide, couché sur mon vélo comme au tour précédent. A la Bresse, je reprends un petit groupe, dans lequel 2 français, que je connais de nom, inscrit en GA. Je commence la côte en tête, on me relaye, le rythme est soutenu, je m’accroche, ma roue lenticulaire semble peser une tonne, ils prennent quelques mètres sur la fin de la côte. Au sommet, il faut penser à manger, pour reprendre des forces. Ensuite dans la descente, je repasse devant. Nouveau passage sur la ligne, nouveaux pointages et encouragements. Ce tour est plus ou moins bouclé dans le même temps que l’autre. Je mène le petit groupe. Nous revenons sur un pro tchèque Vabrousek. Dans la côte de la station de ski, je commence à avoir de moins bonnes sensations, mais je continue à rouler, sans me retourner, personne ne me passe, c’est bon signe, tout le monde a dur. Le tchèque me relaye dans le faux plat, il fait le col suivant en tête, je sens que je ne dois pas aller plus vite. Au ravito suivant, nouvelle prise de bidon, puis c’est la descente. La vitesse faiblit par rapport aux autres tours, il faut récupérer le plus possible. Avec Vabrousek, nous montons ensemble l’ultime col. Pour la première fois je serre les dents, mes jambes sont dures et ne tournent plus facilement, même me mettre en danseuse devient difficile. Je ne sais pas où sont les Français, cela fait un moment que je ne me suis pas retourné. Finalement, Lepers nous passera au sommet, l’air bien fringant. Au début de la descente, tout le monde semble attendre que je passe devant pour tirer. J’hésite, mais j’aperçois encore un Danois et un autre Tchèque, alors je passe et je roule. J’essaye de me rassurer, mais, je redoute la course à pied. Nous rentrons au parc, comme prévu, ce tour est plus lent, mais je suis 14ième, la partie vélo est bouclée en 3H35’ et je prends le 8ième temps !
Les baskets sont enfilées en vitesse, je me ravitaille en eau et en gel, la lucidité est encore bien là . Le Danois est sorti premier de la zone, et est parti fort. Je cherche ma foulée, je respire profondément et ça a l’air d’aller quand même. Au premier kilomètre, les sensations sont bonnes, pourvu que ça dure… Dans la bosse, le Danois faibli, je le lâche, mais un des deux tchèque revient. Nous courons ensemble quelques kilomètres. Vabrousek nous passe avec une foulée tonitruante, l’autre s’accroche. Il me semble que je saurais suivre, mais je laisse aller, mon rythme est assez bon, je joue la prudence. Au demi-tour, je mesure les écarts, il y a quelques gars pas loin, mais ils avancent bien. Je surveille aussi mes arrières : les français sont loin et personne d’autre ne me menace, je continue sur mon rythme : 165 pulsations. Je bois à chaque ravito et je mange un gel tout les tours. Je frissonne, je ne sais pas si c’est le froid où l’émotion. Retour sur la ligne pour un premier passage, beaucoup de personnes m’encouragent, surtout mon frère et sa copine. Ca me donne des ailes, mais je m’emballe, je cours trop vite, je dois me tempérer. Les kilomètres passent, je me sens toujours aussi bien, je ne regarde plus le chronomètre, je sens que je suis dans l’allure. La suite sera limpide, les positions n’évolueront plus beaucoup. La dernière montée sera un peu plus difficile, mais c’est normal après 25 km. Je me lâcherais à 3km du but, pour finir avec un sentiment d’euphorie, en ayant l’impression de voler.
Mes supporters sont là , à 200 m de la ligne, je laisse déjà éclater ma joie. Je passe la ligne les bras au ciel, je suis fier de moi. Je signe le 10ième temps à pied, pour finir 14ième au général, 2ième amateur, premier de mon groupe d’âge (25-30) et également premier belge.
Même si le reste de ma saison était déjà bon, ce résultat me ravit car cette course était un objectif majeur pour moi. Après 2 années de galère, je peux enfin être satisfait de celle-ci : 2 top 15 dans des championnats d’Europe longue distance (dua et tri), une sélection en équipe nationale pour les championnats du monde de duathlon longue distance à Geel où je me classe 26ième élite et 6ième Belge, une 7ième place à Eupen et une course honorable à Brasschaat, après une longue blessure. Il est certain que je garderai en mémoire ces moments magiques, afin de me donner du courage à l’entraînement, après mes journées de boulot. Il m’en faudra beaucoup lors de mes séances de natation où la bagarre est de rigueur pour se faire une place dans un couloir de la piscine publique, pour les heures d’entrainement vélo sur rouleau dans mon garage glacial, ou pendant mes courses à pied à effectuer avec une frontale sur la tête et les pieds dans la boue des chemins des bois belges. Tout cela loin des conditions d’entraînements confortables des élites et des quelques privilégiés de notre sport, partant en stage et profitant de nombreux avantages.
Mais heureusement, il existe toujours quelques personnes passionnées et dévouées, qui donnent, aux amateurs que nous sommes, un coup de pouce et l’envie de nous battre pour pratiquer notre sport.
Je remercie d’ailleur chaleureusement Jacques, sans qui je ne serais pas là aujourd’hui.